Pierre Rabhi

L'Agroécologie

 "La paix et le déploiement des cultures humaines ne se feront que si les hommes et les femmes, au Nord et au Sud accèdent à l’autonomie alimentaire, car se nourrir, nourrir sa famille et sa communauté sont le fondement de toute culture. Alors que les ressources de la planète suffiraient à nourrir douze milliards d'êtres humains, la pauvreté dans le monde s’accroît, la nature, considérée comme un bien matériel, est pillée, les écosystèmes se meurent. Le dogme d’une croissance infinie dans un monde fini est dépassé. Il est urgent de changer de paradigme, de reconsidérer le lien qui nous unit à la terre, de valoriser la coopération plutôt que la compétition pour le bien-être de l’humanité dans son ensemble. L’agroécologie le permet."

"La pratique agroécologique a le pouvoir de refertiliser les sols, de lutter contre la désertification, de préserver la biodiversité, d’optimiser l’usage de l’eau. Elle est une alternative peu coûteuse et adaptée aux populations les plus démunies. Par la revalorisation des ressources naturelles et locales, elle  libère le paysan de la dépendance des intrants chimiques et des transports générateurs de tant de pollutions et responsables d’une véritable chorégraphie de l’absurde où des denrées anonymes parcourent chaque jour des milliers de kilomètres plutôt que d’être produites sur place. Enfin, elle permet de produire une alimentation de qualité, garante de bonne santé pour la terre et ses enfants. Par ailleurs, l’agroécologie bien comprise peut être à la base d’une mutation sociale. Elle est une éthique de vie qui introduit un rapport différent entre l’être humain, sa terre nourricière et son milieu naturel et permet de stopper le caractère destructeur et prédateur de cette relation. C’est ainsi qu’elle représente pour nous bien plus qu’une simple alternative agronomique. Elle est liée à une dimension profonde du respect de la vie et replace l’être humain dans sa responsabilité à l’égard du vivant. Bien au-delà des plaisirs superficiels toujours inassouvis, elle lui permet de retrouver la vibration de l’enchantement, le sentiment de ces êtres premiers pour qui la création, les créatures et la terre étaient avant tout sacrées." Pierre Rabhi 2006

"Ayant passé 50 ans de ma vie à prouver qu’une autre agriculture est possible aussi bien au Nord qu’au Sud, je répète que celle-ci n’est pas envisageable sans la reconstitution et la gestion durable de la vitalité des sols nourriciers.  En outre, il est absolument nécessaire de reconsidérer l’énergie métabolique des très nombreux paysans non mécanisés comme une belle aubaine. Relocaliser l’agriculture, en produisant notamment dans les couronnes péri-urbaines. Serait une anticipation sur les pénuries prévisibles.  Nous ré-inclure dans le cycle de la Vie, en symbiose avec la terre, le végétal et l’animal n’est pas un retour en arrière mais une évidente et urgente réconciliation  avec les lois irrévocables de la Vie.  Enfin, une autre agriculture ne pourra selon moi advenir sans une règlementation internationale interdisant formellement toute privatisation du patrimoine nourricier. Les yeux rivés sur leurs écrans, nombre de nos contemporains souffrent d’une dangereuse amnésie, oubliant que l’agriculture est l’affaire de tous, qu’elle est la plus essentielle de toutes nos activités et que la terre que nous foulons tous les jours est la base de notre vie et mérite notre plus grand respect. C’est cette conscience que je souhaite profondément pour demain, car elle seule peut nous reconnecter avec la beauté de la Vie et sa dimension sacrée dont nous sommes également gravement affamés. Prendre conscience de cela est u pas décisif pour l’intelligence." Pierre Rabhi Chronique pour Kaizen Magazine 2016

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